Bien avant Ghost in the Shell, Mamoru Oshii s’interrogeait déjà sur notre réalité par l’intermédiaire de l’animation, avec Lamu : Un rêve sans fin. Ce film est à ce titre la pierre fondatrice de la carrière de ce cinéaste féru de philosophie. Après avoir réalisé des épisodes de la série animée Lamu, et un long-métrage toujours autour de l'héroïne de Rumiko Takahashi, il a pour la première fois de sa carrière carte blanche pour réaliser un film.

Lamu : Un rêve sans fin ne contentera pas Rumiko Takahashi et encore moins les fans de l’extraterrestre en maillot léopard, qui ne retrouvent pas dans ce long-métrage l’humour vaudevillesque de l’auteure de Ranma ½ et Juliette, je t'aime. Il clair que le réalisateur s'éloigne des oeuvres de Rumiko et de son humour fantasque, afin de proposer une impressionnante fable bergsonienne sur la notion de temps et de durée (en gros la différence entre le ressenti et le temps scientifique). Oshii impressionne par sa virtuosité en terme narratif, il arrive en effet à créer différentes couches de réalité truffées de mise en abyme sans jamais perdre son spectateur.  Du point de vue de la réalisation, le style du cinéaste japonais est déjà présent avec de longs et magnifiques plans contemplatifs qui n’ont rien à envier à ceux de Bergman. On notera aussi des emprunts à Chris Marker et sa Jetée pour certains décors. Sorti en 1984,  Lamu : Un rêve sans fin est un film qui annonce le cinéma de science-fiction à venir.  Inception, Matrix lui doivent beaucoup et paraissent moins accomplis dans leurs réflexions que le long-métrage de Mamoru Oshii !

Un réalisateur immense qui réussit à allier l’expérimental et le spectaculaire, transformant une simple commande en une oeuvre singulière à l’intelligence rare. Il est vraiment regrettable qu’il n’existe pas de réédition de Lamu : Un rêve sans fin depuis le DVD de 2004 de Kaze, alors que ce long-métrage est un chef-d'oeuvre de l'animation.

Mad Will