Quand le cinéaste qui a signé Fame et Midnight Express met en scène dans son film la musique des Pink Floyd, le fan de rock court le voir, surtout quand nous avons le droit à l’adaptation de l’une des oeuvres maîtresses du groupe. Datant de 1979, l’album concept The Wall qui sert de matériel musical et narratif au film, changeait de la musique habituelle du groupe de pop progressive. Habituellement marquée par de grandes envolées avec des morceaux dépassant allégrement les 10 minutes, la musique de The Wall est plus resserrée avec de nombreuses chansons courtes. Ce disque qui évoquait l’isolement et ses conséquences mentales, était avant tout la création du bassiste Roger Waters qui avait commencé à vampiriser le groupe (qui le voulait bien) depuis Wish You Were Here et qui signait ici avec The Wall un album solo où les autres membres servaient plus volontiers d’accompagnateurs. L’idée de cet album serait née après un incident entre Waters et un fan qui avait provoqué le musicien en ne cessant de le haranguer pour entendre les vieux morceaux du groupe. Ulcéré, Water avait fini par lui cracher dessus. Cet accident le marqua profondément, et le projet The Wall, manifeste sur l’isolement des stars de rock, était né.

The Wall fut l’un des tournages les plus compliqués de la longue carrière de Parker. Le principal problème qu’il eut à gérer fut Roger Waters, habitué à jouer le despote au sein des Pink Floyd, et qu’il devait tenir éloigné de la table de montage et des plateaux. Que ce soit l’album ou le film, The Wall fut mal reçu par une critique musicale obnubilée par les modes et qui n’a qu’une obsession : ne pas paraître ringarde. Quand on revoit ce long-métrage, la force et la sincérité de l’oeuvre sautent aux yeux. Création autobiographique, Waters y évoque son enfance, la drogue et son mal-être avec une grande sincérité. Quant à la réalisation expressionniste de Parker, elle ne tombe jamais dans les artifices du vidéo-clip. Servi par un scope de toute beauté, le réalisateur anglais crée une imagerie forte et donne littéralement corps aux paroles du leader des Floyd. C’est à ce titre que parmi tous les opéra-rock, The Wall est peut-être l’oeuvre la plus cinématographique, car Parker n’illustre pas les chansons, mais crée une réelle narration autour de l’errance mentale d’un musicien devenu à son insu, une star. À noter la prestation totalement habitée de Bob Geldoff qui fait l’acteur alors qu’il est plus connu comme musicien et organisateur de concerts caritatifs tel que le Live Aid .

Un film noir presque suicidaire porté par des morceaux sublimes tels que Confortably Numb. À voir et à revoir pour comprendre qu’à l’époque, on pouvait porter un discours et être des stars de la musique. Sublime tout simplement !

Mad Will