De tous les cinéastes de la Nouvelle Vague, Jacques Demy est tout mon préféré. Pourquoi ? La réponse est simple. C’est un cinéaste qui allie la technique au discours. Pour un grand nombre de personnes, les films de Demy seraient de la guimauve ! Mais les ont-ils déjà vus ? Non. Car derrière les couleurs chatoyantes de l’enchanteur qu’était Demy, se cache une vision sombre de la société. On côtoie ainsi un serial killer dans Les demoiselles de Rochefort. De la même manière, nous avons le droit à un Michel Piccoli se tranchant la gorge face caméra dans Une chambre en ville.

Dans le cas de Peau d'âne, il n’hésite pas à parler de façon triviale d’inceste avec la chanson de la fée des lilas où Delphine Seyrig chante  « Mais une fille et son père c’est ma foi, Un échec assuré, une progéniture altérée ». Demy souhaitait pour mettre en images ce conte, retrouver l’esthétique bariolée du Blanche Neige de Walt Disney avec une profusion de couleurs rappelant le Technicolor d’antan. Il emprunte aussi au cinéma de Cocteau avec l’arrivée un brun surréaliste d’un hélicoptère en plein conte de fées. Avec ses chansons faisant allusion à la drogue et au sexe, Peau d'âne offre une double lecture qui lui permet d’être goûté par les enfants, et d’être regardé par les adultes qui apprécieront un long-métrage bien plus subversif qu’un Disney. Moins définitif que Les Demoiselles de Rochefort, Peau d'âne témoigne du talent d’un réalisateur qui savait concilier cinéma populaire et regard d’auteur. Une oeuvre à redécouvrir à l’instar de son Joueur de flûte, plus sombre encore !

Mad Will