La réalisatrice D Smith a choisi comme sujet pour son premier film et documentaire d’interviewer Daniella Carter, Koko Da Doll, Liyah Mitchell, Dominique Silver, quatre femmes noires prostituées trans à Atlanta et New York. Celles-ci exposent sans réserve leur quotidien, parfois de façon très crue, mettant en avant ce que veut dire être une travailleuse du sexe en Amérique, noire et transgenre. Elles abordent donc les thématiques liées à leur statut mais aussi d’une façon plus générale les problèmes de la communauté afro-américaine, des rapports homme/femme et de l’amour en général.

Il faut souligner la qualité des témoignages recueillis, car ces femmes sont, au sens premier du terme, extraordinaires. Elles font preuve d’une lucidité et d’une énergie étonnante au regard de leur parcours de vie. En réalisant ce documentaire, D.Smith leur a permis de s’exprimer et de parler en toute liberté de ce dont on a peur de parler. Ces femmes ont choisi de se saisir de cette opportunité.

Si l’on peut ternir cette critique par quelques bémols, car dans la forme certains des inserts n’apportent rien au propos, ou sur le fond car la population choisie n’est peut-être pas représentative, il n’empêche que ces témoignages valent largement la peine d’avoir été recueillis et partagés. Il en résulte un film ramassé et dynamique, (il dure 73 minutes) toujours authentique et sincère, empli d’empathie et d’humour, ces femmes faisant preuve d’une farouche énergie d’aller de l’avant. Comme dit l’une d’elle « j’ai choisi d’entrer en transition, maintenant il faut assumer ».

Réalisé dans un superbe noir et blanc à l’esthétique travaillée, accompagné d’une magnifique bande-son (D. Smith était productrice de musique avant ce premier film), ce film nous propose donc de découvrir des témoignages rares et éclairants, même et surtout si le monde transgenre vous est inconnu.

Laurent Schérer