Il fallait oser proposer comme personnage principal de long métrage un coquillage chaussé. Dean Fleischer-Camp l’a fait, et avec bonheur, stimulé en cela par une première version sous la forme d’un court publié en 2010 sur YouTube. Il en résulte un film tranquille, aux couleurs pastel, et qui nous change des habituelles marionnettes guimauves, vociférantes et insipides.

Marcel vit dans une maison, à l’abri des regards de ses occupants. Malheureusement, sa famille et ses amis sont emportés un jour par mégarde par un des locataires. Marcel se retrouve seul avec sa grand-mère. Il se laisse apercevoir par Dean, un réalisateur qui vient d’arriver par l’intermédiaire de Airbnb. Celui-ci décide de lui consacrer un documentaire. Le film Marcel le coquillage (avec ses chaussures) relate le tournage de ce futur documentaire.

Il en résulte un film hybride, dans lequel les marionnettes en stop motion côtoient le réalisateur en chair et en os, accentuant ainsi l’aspect d’étrangeté du scénario, Dean n’ayant absolument pas l’air surpris de se trouver nez à nez avec un coquillage cyclope, mobile sur ses pieds chaussés, et doué de parole. Et quelle parole ! D’une voix de fausset il va raconter ses histoires, triste pour la principale (la perte de sa famille) mais drôle pour le reste, à savoir son adaptation au monde des hommes, endossant alors le rôle de l’Ingénu.

La force du film est d’arriver à traiter tout en douceur et en simplicité des thématiques comme la séparation, les liens entre individus, l’altérité, pourtant pas si simples que cela.

Le réalisateur fait preuve d’imagination pour créer l’univers dans lequel évolue le coquillage, qui rappelons-le n’a qu’un œil et ses deux pieds pour marcher. Le monde humain devient ainsi un espace difficile à acclimater, mais que la famille de Marcel avait réussi à domestiquer.

Bref, un film original qui, je n’en doute pas, touchera petits et grands.

Laurent Schérer