Amel (Afef Ben Mahmoud) est une femme tunisienne, mère de Moumen (Iheb Bouyahya), un jeune gardien de but talentueux. Elle a vécu la perte de son fils ainé, drame dont le père, devenu depuis alcoolique, ne s’est pas remis.

Amel travaille dans une entreprise de confection. Un jour, elle pense pouvoir aider son fils à changer de club pour accéder à un plus prestigieux, grâce à l’entregent d’un ami de son patron. Celui-ci lui donne un rendez-vous pour parler « affaires ». Mais ce n’est pas du tout ce que celui-ci avait en tête. Sans tenir compte des refus d’Amel il tente d’abuser d’elle et l’entraine dans un lieu où la police les surprend. Riche et influent, l’ami du patron s’en sort sans dommage, alors qu’Amel, accusée d’outrage à la pudeur et d’adultère, est jetée en prison. Son fils déboussolé entame alors une descente aux enfers.

S’appuyant sur ses propres expériences, le réalisateur tunisien Mehdi Hmili décrit dans son second film Amel et les fauves une société patriarcale et injuste, malade de la corruption qui la mine. À travers la situation particulière de cette famille, il dénonce les errances de toute une société.

Véritable thriller social, Amel et les fauves nous promène dans les milieux interlopes de Tunis où s’est réfugié Moumen. Ces milieux, dans lesquels règnent la violence et la prostitution, ont comme chefs des personnages peu recommandables qui font ami-ami avec les forces de sécurité qu’ils arrosent, ces policiers étant parfois les mêmes que sous le précédent régime haï de Ben Ali. Mais grâce à l’amour que se portent la mère et le fils, il sera possible pour eux de reconstruire une histoire familiale malgré un grand nombre de difficultés qui auraient pu les amener au désastre, au cœur d’une société qui n’est pas celle à laquelle aspiraient les auteurs de la révolution du jasmin.

À cause de certaines de ces scènes, qui montrent une réalité mise trop souvent sous le tapis, ce film a été censuré dans beaucoup de pays arabes et dans les festivals qui s’y déroulent. Pourtant, ce film intense est indispensable pour mieux comprendre la société tunisienne contemporaine.

Laurent Schérer