Célèbre photographe animalier, Laurent Geslin vient de s’essayer au cinéma avec le spectaculaire Lynx. Un premier long métrage bluffant car Laurent Geslin capte des images de l’animal dans son milieu naturel, alors qu’il est l’un des plus discrets d’Europe, tout en nous offrant des vues magnifiques du trop méconnu massif jurassien. Après visionnage de ce film, la vie du lynx, espèce protégée et en danger, n’a presque plus de secret pour nous. Je dis bien « presque » parce que Laurent Geslin avoue avec grande modestie qu’un certain nombre des comportements du plus grand félin d’Europe, malgré neuf années de traque et de planques, resteront encore obscurs à ses yeux ainsi qu’à ceux des scientifiques.

Laurent Geslin va s’attacher tout d’abord à suivre un mâle sur son immense territoire, le perdant de vue parfois plusieurs semaines, mais le retrouvant malgré tout, guidé par ses cris lors de la saison des amours  (lorsque le lynx appelle une femelle on dit alors qu’il chante) ou par le comportement des hardes de chevreuils et autres chamois effrayés par sa présence. Il aura ensuite le privilège, lorsque le mâle aura trouvé sa femelle, de suivre et de filmer pendant une année le couple de lynx. Nous assisterons ainsi à la gestation de la femelle, mais également à la progressive émancipation des petits par le biais d’images rarissimes de petits lynx dans leur tanière.

Comment résister à l’empathie et l’appel de la nature au fur et à mesure que se déroule le film ? Et ce d’autant plus que le réalisateur nous offre aussi de splendides images de la biodiversité. En particulier il ne résiste pas à l’envie de nous présenter des chouettes sortant comiquement la tête de leur trou d’arbre pour observer leur environnement.

Ainsi, nous apprenons que le lynx participe directement à la sauvegarde de la forêt en régulant par ses captures  les herbivores qui mangent au printemps les bourgeons des hêtres, sapins et autres bouleaux. Plus étonnant encore, nous prenons conscience grâce à ce film que de nombreuses espèces animales communiquent entre elles pour s’avertir d’un danger, en l’occurrence l’arrivée d’un félin. Le lynx devra alors s’attaquer aux plus faibles, participant ainsi à maintenir la vigueur des troupeaux.

Ode à la biodiversité et ode au monde sauvage, ce film unique, sans sentimentalisme ni anthropomorphisme, nous convainc de laisser tranquilles les lynx, maillon essentiel de notre environnement, et de préserver les dernières poches de nature indemnes de notre territoire.

Bravo Monsieur Geslin.

Laurent Schérer