Le distributeur Les acacias poursuit son exploration de la filmographie du cinéaste japonais Mikio Naruse avec deux nouveaux longs-métrages jusqu’à présent inédits en France : À l’approche de l’automne et Derniers chrysanthèmes.

Ce dernier film sorti au Japon en 1954 expose la vie de trois anciennes geishas, Kin, Tomi et Tamae qui s’interrogent sur le sens de leur vie et leurs amours passés.

Kin est prêteuse sur gage et ne pense qu’à l’argent, dure avec tout le monde, y compris ses anciennes compagnes, elle vit avec une servante sourde. N’ayant pas d’enfant, elle passe son temps à compter ses billets de banque et à rêver de sa vie passée. Tomi et Tamae dont la vie est contrainte par des problèmes d’argent, font quant à elles face au départ de leurs enfants Kiyoshi et Sachiko. Elles s’effraient alors de se retrouver seules et noient leur chagrin dans l’alcool.

Naruse nous donne à voir trois femmes japonaises en perte de repères dans une société qui ne s’est pas encore remise des stigmates de la guerre. Avec sa misandrie habituelle, il dresse un portrait peu flatteur des anciens amants qui gravitent autour de Kin pour son argent.

Naruse, comme à son habitude, cadre ses décors avec précision. Ici les intérieurs enferment les personnages, entre portes qui se ferment et fenêtres donnant sur des venelles resserrées, presque seuls extérieurs qui nous sont donnés à voir. Même dans la gare, lieu pourtant propice aux plans ouverts, Naruse ne montre rien de celle-ci à l’exception de l’escalier qui mène aux quais.

Naruse, en cinéaste de la condition féminine a une vision très pessimiste de la société japonaise et de la place qu’elle laisse aux femmes. Derniers chrysanthèmes reprend les thèmes de son chef-d’œuvre Le repas trois ans après, pour les mener encore plus loin. Dans ce film Michiko s’y interrogeait sur ses rêves de jeune mariée, en tentant de les retrouver lors d’un voyage à Tokyo. Dans Derniers chrysanthèmes les trois geishas savent qu’elles n’ont plus rien à espérer.

Laurent Schérer