Sur le papier, Vaurien, de Peter Dourountzis est un thriller dont le scénario, pourtant très écrit, ne brille apparemment pas par son originalité. La caméra suit un psychopathe pervers, « Djé » joué par Pierre Deladonchamps.
Cependant, l’acteur s’avère ici remarquable en incarnant un personnage ambigu, détestable aux yeux des spectateurs, mais charmeur auprès de ses proies. Son jeu renforce ainsi le caractère anxiogène de la mise en scène qui est l’un des aspects les plus intéressants de ce long-métrage. En effet, le réalisateur suggère ici plus qu’il montre : une main qui se crispe, une sirène de police… L’art du détail du cinéaste est ici toujours au service de la narration.
Djé ne sait pas se contraindre. Il ne maitrise pas ses pulsions intérieures qui l’ont conduit déjà en prison. Pourquoi a-t-il été condamné ? Le film nous le dévoile petit à petit, dans un suspense où l’on ressent en permanence la tension que le personnage entretien en permanence autour de lui. Funny games d’Haneke n’est pas loin
Enfin, il faut souligner la dimension sociale de ce thriller qui ne se limite pas au simple portrait du psychopathe. Peter Dourountzis place ainsi son tueur dans un décor réaliste : le milieu des SDF et autres mal logés. Djé trouve une place dans un squat, participe à des actions de « sensibilisation » ou à des maraudes d’une association d’aide aux sans-abri.
Surtout, cet film est traversé par le thème de la place faite aux femmes dans la société. En effet les hommes sont montrés le plus souvent comme sexistes et méprisants. Ce que le décor nous rappelle à plusieurs reprises, quand la caméra passe devant des tags peints contre les agressions faites aux femmes. Le cinéaste place également dans ses plans des panneaux d’information d’appel à la prudence sur lesquels sont inscrits « faites-vous raccompagner » pour nous signifier que Djé peut être perçu comme le produit d’une société prédatrice envers le sexe opposé.
Au final un thriller plein de suspens totalement maîtrisé, un premier film très solide.
Laurent Schérer
