En adaptant à l’écran le livre de l’écrivain brésilien Fernando Morais The Last Soldiers of the Cold War  qui relate l’histoire des Cuban Five, cinq espions cubains infiltrés en Floride, et la guerre souterraine entre les exilés cubains et le régime de Castro, Assayas signe avec Cuban Network, sélectionné à la Mostra de Venise 2019, un film noir. En effet, il met en évidence la noirceur de l’âme (à se demander s’ils en ont une) des idéologues de tous bords.

René Gonzalez (Edgar Ramirez, déjà vu dans Carlos, précédent film d’Assayas ), pilote d’avion cubain, abandonne sa femme Olga (Pénélope Cruz) et sa fille pour rejoindre la Floride et le camp de la liberté. Le spectateur entre alors dans le monde de l’espionnage et du contre-espionnage avec ses trahisons, coups fourrés et compromissions de toutes sortes.

Tourné à Cuba, Cuban Network est un film d’espionnage qui, grâce à une analyse fine des enjeux, montre que quel que soit le régime, communiste pour Cuba ou démocratique pour les USA, les « petits » sont des pions, manipulables et sacrifiables à merci. Que les dirigeants se servent des grandes idées et grands principes pour manipuler leurs ressortissants et que les naïfs qui pensent accomplir leur devoir et travailler pour leurs idéaux seront toujours des proies faciles pour les cyniques qui nous gouvernent. Que ce qu’on appelle actuellement « Fake news » n’est pas une découverte de Trump mais faisait précédemment partie de ce qu’on appelait manipulation et désinformation.

Le jeu des acteurs est parfaitement au point et participe certainement à la réussite du film. Toujours dans le ton juste, que ce soit dans le drame familial ou pour jouer le thriller d’espionnage, la flopée d’actrices et d’acteurs de talent participent fortement à l’adhésion du spectateur à la « véracité » de l’histoire. Le rôle le plus emblématique est celui joué par Pénélope Cruz qui encaisse les coups les plus rudes car elle est au centre de l’intrigue. Elle est en effet exposée en tant que femme,  étant la dernière informée des machinations des hommes qui l’entourent.

Un film haletant, rempli de rebondissements qui contribuent à nous rappeler les complexités et les contradictions de la politique et qui nous fait passer deux bonnes heures au cinéma.

Laurent Schérer