A mille lieues du Black swan d’Aronofsky, Kiss & Cry fait le pari du réalisme, en mettant en scène le quotidien d’une jeune patineuse « championnable » (Sarah Bramms) au sein du club de patinage de Colmar. L’entraîneur sadique, la concurrence entre filles, le sacrifice de la vie privée, tout y est, mais avec l’épaisseur de vraies individualités. Le film explore l’écartèlement grandissant des jeunes patineuses, à l’adolescence, entre la contrainte à laquelle elles se soumettent en s’engageant dans le sport de compétition, et l’hédonisme qu’elles aperçoivent au dehors et auquel elles aimeraient parfois pouvoir elles aussi s’abandonner. Alors qu’elles exécutaient le désir de leurs parents sans se poser de questions, et que la contrainte leur était imposée de l’extérieur, en devenant plus autonomes elles doivent trouver en elles le moteur de leurs actions. Entre la discipline permettant de se surpasser soi-même pour devenir meilleures que les autres et le lâcher prise en vue d’être intégrées à un groupe, la liberté et le suivisme ne sont pas forcément là où elles le croient. Ainsi, à travers le portrait d’une jeune fille de notre temps, mais aussi des adultes qui gravitent autour d’elle, Kiss & Cry illustre bien la difficulté pour les éducateurs actuels de concurrencer les écrans capteurs de l’attention des jeunes, et destructeurs de leurs capacités de concentration.

Florine Lebris