« Bayiri » est le nom donné à l’opération consistant à « faciliter » le retour des travailleurs burkinabés immigrés en Côte d’Ivoire lors de la guerre civile de 2002.

Dans sa fiction éponyme, Sakama Pierre Yameogo met ainsi en scène l’exode des habitants d’un village, contraints de fuir suite à l’attaque de milices et/ou de l’armée régulière, et les violences qu’ils subissent de la part des deux camps, conséquences d’une atmosphère raciste et xénophobe. Les réfugiés tombent en effet de Charybde en Scylla lorsqu’ils passent en zone « libérée » par les « forces nouvelles », subissant viols et rackets.

Le réalisateur s’appuie sur deux personnages principaux que le destin fait se rencontrer : Biba, une jeune femme réfugiée, et Zodo, un « coupeur de route », c’est-à-dire un voleur qui rançonne les voitures et voyageurs qui passent. En parallèle de cette histoire, le réalisateur burkinabé choisit d’utiliser des plans longs qui égrènent les images dans un rythme lent, comme les files d’attente des réfugiés devant les barrages, les postes de police ou de contrôles divers, et dans le camp en attente d’eau ou de nourriture de la part de la Croix Rouge.

Bayiri, la patrie revient donc sur une période noire de la Côte d’Ivoire, qui commence en 2002, pendant laquelle chacun était considéré comme un suspect potentiel et à ce titre pouvait être humilié, rançonné ou tué.

Dénonçant les exactions des deux camps sans compromission mais sans non plus en rajouter sur une situation intrinsèquement tragique, ce film dérangeant a été mis à l’index par les autorités politiques, n’a pas été sélectionné au FESPACO (Festival Panafricain du Cinéma de Ouagadougou) et n’a pas non plus été diffusé malgré un préachat par Canal Horizon, le Canal+ africain.

Espérons que le public français lui réserve un meilleur accueil !

L.S.