Si le titre L’amour à la ville laisse à penser que ce film composé de six sketches traite d’un sujet frivole, il n’en est rien puisque cette œuvre prend comme thème des sujets graves tels que la prostitution, le suicide, l’abandon des femmes par leurs amants ou des enfants par leur mère. Les sketchs ont en effet comme point commun de s’inscrire dans le ton du néoréalisme social, dans une vision incisive, voire d’une profonde noirceur, de la société italienne d’après-guerre où l’amour est montré souvent comme vénal.

Réalisés en 1953 par six auteurs italiens, ces courts-métrages sont un réquisitoire implacable contre une société machiste dans laquelle le plus faible, le plus souvent la femme pauvre, ne peut s’en sortir. Ces sketchs sont signés de réalisateurs prestigieux qui feront souvent une longue carrière que ce soient Dino Risi, Frederico Fellini ou Michelangelo Antonioni. Nous retrouvons également derrière la caméra Cesare Zavattini, le scénariste du voleur de bicyclette et Francesco Maselli dont le Storia d’amore fut primé à Venise en 1986.

Ces sketches s’inscrivent dans la prise de conscience d’un dysfonctionnement de la société italienne, en ce qui concerne la place qu’elle réserve à la femme, sujet qui sera repris par le réalisateur Antonio Pietrangeli dans le superbe long métrage Adua et ses compagnes sorti en 1960. Le dernier court, Les Italiens se retournent, étant une dénonciation (déjà !) du regard masculin oppressant duquel les Italiennes souhaiteraient s’émanciper.

Ces six courts : Suicides manqués de Michelangelo Antonioni, Agence matrimoniale de Federico Fellini, Le Bal du samedi soir de Dino Risi, L'Amour qu'on paie de Carlo Lizzani, L'Histoire de Catherine de Francesco Maselli, et Les Italiens se retournent d'Alberto Lattuada, sont donc à (re)découvrir grâce aux films du Camélia.

Laurent Schérer