Il ne faut pas s’attendre au visionnage de Première campagne, film de la documentariste Audrey Gordon, à une analyse fine des jeux de pouvoir façon Borgen, à la révélation des crapuleries de certains de nos politiques façon Baron noir ou à une critique féroce façon Michael Moore. Non, le film a une tout autre ambition : documenter au jour le jour la couverture de la campagne d’Emmanuel Macron par la journaliste de France 2 Astrid Mezmorian, dont c’était la première campagne à l’instar de notre futur président, comme le sous-entend le titre du film.

Nous sommes donc face à un double récit d’apprentissage, l’accent étant toujours mis sur celui de la journaliste. Mais cette captation au plus près du métier n’empêche pas la réalisatrice d’observer une certaine distanciation, tant sur le travail de la journaliste, que sur celui du politique. Cette distance est tout l’intérêt du film, comme lorsque la réalisatrice capte une séquence très drôle sur Philippe Poutou, qui permet au spectateur de se rendre compte du fossé entre les candidats hyper médiatisés et les autres, apportant une vraie réflexion sur la conduite des élections. Cette distanciation primitive se double d’une secondaire, temporelle, et encore plus éducative pour le spectateur. Ainsi, on ne peut s’empêcher de mettre en relation ce qui a été dit à l’époque, et compris par ceux qui écoutaient, voire portaient, la parole d’En Marche, et ce qui s’est déroulé depuis. Le discours d’Emmanuel Macron le soir de sa victoire et les espoirs qu’il a suscités auprès de ses soutiens en est un formidable exemple.

Primé à juste titre par le Grand Prix du Festival International du film politique - Politikos en 2018, Première campagne est un film à voir pour tous ceux qui veulent en apprendre plus sur le jeu politique actuel.

L.S.