Au croisement du récit fantastique et du conte philosophique la nouvelle fiction du réalisateur franco-iranien Chapour Haghighat tournée au Tadjikistan, Trois petits rêves, est une charge sévère contre le régime iranien. En effet ce film dénonce la mainmise des gardiens de la révolution et des mollahs sur une société toute entière. Cependant la forme de ce film, les récits de trois rêves d’enfants, lui permet de ne pas se ranger dans la catégorie des films manichéens ou de propagande.

Bâbak, Latif et Djâvid, tiennent à Doshan, petit village au nord-est de l’Iran, la boulangerie familiale dont le père, revenu paralysé de la guerre, ne peut plus s’occuper. Tout en pétrissant, cuisant et vendant le pain, ils répondent aux sollicitations au quotidien de leur père et vont se raconter leurs rêves. Ceux-ci, mis bout à bout, vont permettre de reconstituer l’histoire du meurtre d’Abbas, peintre et artiste local par le gardien de la révolution responsable de la police et chargé de faire régner « l’ordre ». 

La mise en scène est simple comme des rêves d’enfants. Son caractère épuré participe également au traitement quasi documentaire de la vie dans le village. Nous découvrons les enfants qui travaillent, les femmes mises à l’écart, le juif maltraité, et une société faite de personnes pauvres ne possédant que le minimum, et dans laquelle celui qui a un compte en banque et une maison est considéré comme un riche nanti.

En creux nous découvrons un Iran dur pour les adultes, mais encore plus pour les enfants. Nulle place ne leur est faite. Pas de jeux, pas de tendresse, l’expression des émotions passe par le silence. Les songes sont les seules échappatoires possibles, un imaginaire à partager qui donne cet aspect onirique et fantastique au scénario et qui en renforce habilement le propos.

A noter que les trois précédents films de fiction de Chapour Haghighat (Le chant nocturne des voyageurs, La terre ferme, Le silence) seront visibles entre le 21 novembre et 4 décembre aux 3 Luxembourg à Paris et dans toute la France.

L.S.