Habité par la révélation d’un Dieu intérieur, un jeune homme (Michael Silva) pérégrine de village en village, dans la pampa chilienne, pour annoncer la bonne nouvelle à son prochain. A l’instar de tous les visionnaires incompris par la masse grégaire, à l’instar du Christ condamné à la crucifixion par la foule, il rencontre peu d’oreilles en mesure d’entendre son message. Obstiné, fidèle à la tâche qu’il s’est donnée, il n’en continue pas moins de faire vivre la religiosité à laquelle il croit par le sens de l’écoute dont il témoigne à tous ceux qu’il croise, quels qu’ils soient.

Loin de faire un film-prêche, Christopher Murray tisse, par l’intermédiaire d’un enchevêtrement de paraboles, ce que la Bible peut donner de meilleur : une belle histoire édifiante dépourvue de dogmatisme. Alliant la forme au fond, il magnifie dans des plans léchés les habitants de la Pampa del Tamarugal avec lesquels il a écrit Le Christ aveugle dans un « processus de création collective ». En point d’orgue de la quête initiatique du jeune homme fraîchement éveillé à la foi, il signe même une séquence métaphysique digne de la puissance symbolique du Petit Prince de St-Exupéry sur la nécessité de fermer les yeux sur l’absence de sens de la réalité matérielle pour mieux laisser naître à l’intérieur de soi un chant d’amour. Le réalisateur chilien met ainsi la puissance des images au service d’une conception anticléricale et immanente de la foi, sagacement œcuménique.

F.L.

Retrouvez l'interview du réalisateur en espagnol par Florine Le Bris : https://soundcloud.com/user-544520417/interview-christopher-murray-pour-le-christ-aveugle