Quand il perd sa mère, Nassim (Klaled Alouach) est placé en foyer. Il le cache à ses camarades du lycée parisien chic où il a entamé sa scolarité. Quand la directrice de son foyer (Yolande Moreau) lui préconise de se tourner vers des études courtes, les seules que l’Etat lui paiera, il comprend l’importance de ne pas se démobiliser scolairement. Avec l’aide d’une grande sœur choisie (Jisca Kalvanda), il va tenter de toutes ses forces d’avoir les résultats nécessaires pour passer en Terminale dans son lycée général.

Sur un scénario très proche, la cuvée 2017 des Césars a récompensé le court-métrage Ma vie de Courgette. Lorsqu’elle est venue chercher sa Palme, sa scénariste Céline Sciamma a déclaré : « Je crois qu'on avait besoin de ce récit qui dit que la famille ça s'invente, ça se recompose, ça se choisit. Je crois qu'on avait besoin d'un récit qui nous ressemble, c'est-à-dire un récit du côté des sensibles, des fragiles, un récit du côté des amitiés solidaires, des humiliés - les vrais ». Dans De toutes mes forces, les personnages sont de chair et d’os et ils ne vivent pas dans un univers à la violence édulcorée par les jolies couleurs vives de Claude Barras, propre à insuffler un peu d’espoir au cœur d’une époque désespérée. D’autant plus percutant qu’il ne prive en rien le réel de ses nuances les plus sombres, le film de Chad Chenouga gagne en impact ce qu’il perd en tendresse. Alors qu’une reconstitution irréaliste de la vie au foyer l’aurait borné à la bonne intention maladroite, le réalisateur a réussi son casting. En plus de la bande de ‘’cas sociaux’’ plus vrais que nature qu’il a judicieusement composée, il a su rallier au projet deux actrices aux jeux remarquablement singuliers : Yolande Moreau, à mi-chemin entre la douceur et l’intransigeance ; et Jisca Kalvanda, la dealeuse virile de Divines, à nouveau très intense dans un rôle de battante de l’extrême.

F.L.