1944, petite ville du Nord de la France. Barny (Marine Vacth) a l’Idéal chevillé au corps, croit fermement à la fraternité universelle de tous les hommes et refuse toute compromission avec l’occupant allemand. Léon (Romain Duris) croit fermement que l’Amour du prochain nous rend meilleur, qu’il faut être capable de sacrifier sa petite personne à des intérêts supérieurs, et travaille sans cesse à s’améliorer lui-même. Ces deux-là sont faits pour s’entendre, pour s’aimer peut-être. A moins que leur confession ne les sépare. Pour tout le monde en effet, il est le « père Morin », prêtre catholique, et elle est « Barny la rouge », militante communiste. Leur rencontre ne peut produire que des étincelles. Elles sont de fiel, d’abord, tant la jeune femme est conditionnée à bouffer du curé. Mais elles se transforment bientôt en miel, par l’opération de la verve de ce clerc non conventionnel dont la beauté du verbe fait déjà fondre toutes les autres paroissiennes. Pour ces deux habiles rhéteurs, avoir trouvé un adversaire à sa hauteur est d’autant plus galvanisant que l’Occupation empêche toute liberté d’expression. A mesure qu’ils se rencontrent au prétexte de tenter de se convaincre mutuellement, ils échangent de plus en plus pour le seul plaisir de la joute verbale. Rigoureusement fidèles au compagnon qu’ils se sont choisis, ils sont alors soumis à la tentation d’une relation taboue…

Made in France, Le précédent film du réalisateur qui dépeignait la montée du djihadisme, et dont la sortie était prévue pour novembre 2015 fut victime de la clairvoyance de son auteur et ne fut pas distribué en salles. Nicolas Boukhrief s’intéresse ici simplement aux idées et à l’impact qu’elles peuvent avoir sur nos choix de vie. La confession est un régal pour les yeux, les oreilles et le saint esprit. Plaisanterie mise à part, si ce film est spirituel, il n’en est pas pour autant prosélyte. Adaptant en le modernisant le livre de Béatrix Beck Léon Morin, prêtre, le réalisateur en tire des dialogues de la plus belle facture qui reprennent le fameux débat sur l’existence de Dieu qui traverse toute l’Histoire de la philosophie. A ce film intellectuellement stimulant, la perspicacité espiègle des deux excellents acteurs principaux ajoute à La confession la drôlerie sans laquelle elle aurait risqué de virer au film didactique pompeux. La justesse de leur jeu et la suavité de leurs voix rendent au contraire les dialogues exigeants du cinéaste fluides et même délicieux. Quant aux autres aspects du film, ils sont à l’image de son message : humbles. Aucun des acteurs secondaires (parmi lesquels Anne Le Ny, impayable en patronne opportuniste) ne ramène la couverture à soi, mais tout le monde est impeccable. La photographie est belle mais résiste toujours à la tentation de l'épate vaine. La reconstitution historique est précise sans être tape à l’œil. Au final, dans La confession, de la voix de Romain Duris aux yeux de Marine Vacth en passant par les idéaux par lesquels les personnages se transcendent, tout est très beau, tout simplement.

F.L.