George Romero nous a quittés en 2017 et pourtant l'actualité autour de ce maître de l’horreur n'a jamais été aussi importante. Ainsi à partir du 23 octobre, grâce au distributeur Solaris, vous pourrez voir sa première trilogie autour des morts-vivants (La Nuit des morts-vivants , Zombie et Le Jour des morts-vivants ) dans de magnifiques copies. De la même manière, un film inédit du maître vient d'être redécouvert aux USA. Intitulé The Amusement Park, ce long-métrage a donné lieu à une campagne de financement participatif pour sa restauration (lien). Nous espérons que l'opération portera ses fruits afin de nous permettre de découvrir cette histoire autour d’un vieil homme perdu dans une fête foraine terrifiante. De la même façon, la suite de La Nuit des morts-vivants a été annoncée d’après un scénario inédit de George Romero et John A. Russo. Mais pour l’instant, je vous propose de revenir sur la riche carrière de ce grand réalisateur !

Romero est l'une des figures essentielles du cinéma indépendant américain. Cinéaste allégorique par excellence, ses films par le biais du fantastique nous parlaient de notre société. Si le cinéaste a connu le succès public, plusieurs de ses longs-métrages en dehors de sa saga autour des morts-vivants n’ont pas eu le succès commercial qu’ils méritaient, à l’image de Martin , Incidents de parcours ou son Knightriders . Une malédiction pour un cinéaste dont le film La Nuit des morts-vivants aura été vu par des millions de personnes sans pour autant lui rapporter des dividendes à cause d’un problème d’enregistrement des copies du film qui aura pour conséquence que ce long-métrage sera libre de droits !

Originaire du Bronx, Romero est le fruit de l'amour entre une mère lituanienne et un père cubain. Dès son plus jeune âge, le réalisateur américain se prend de passion pour le cinéma grâce au travail de dessinateur de son père pour la National Flag Company qui réalisait des banderoles pour des films et des pièces de théâtre. Romero se rend très tôt dans les cinémas de son quartier pour aller voir des longs-métrages de genre et surtout des films d'horreur. Ce sera la vision du Voyeur de Michael Powell qui le poussera à devenir réalisateur. Le garçon qui veut travailler dans le septième Art reçoit alors en cadeau un projecteur de la part de ses parents. Il se lance dans la production de films grâce à la caméra 8mm de son oncle et sa tante. Après le lycée, il devient coursier sur plusieurs tournages. Fatigué par la vie new-yorkaise et ses diverses expériences dans le 7ème art, il part alors vers Pittsburgh pour étudier la peinture et design. Il se crée là-bas une bande d’amis avec qui il tournera quelques années plus tard La Nuit des morts-vivants . Après s’être fait la main sur des courts-métrages et des longs métrages restés inachevés, il a fini par développer un solide savoir-faire et fonde en 1963 Laten image, une boîte de production spécialisée dans la publicité et le film d’entreprise. Les débuts sont difficiles, mais il finit par arriver à acheter du matériel de cinéma et à se constituer une équipe grâce aux différentes commandes réalisées pour des industriels ou des politiques du coin. À l’aube des années 70, il est temps pour lui et ses associés de tourner un vrai film de cinéma qui sera La Nuit des morts-vivants .

La Nuit des morts-vivants

La Nuit des morts-vivants révolutionna la manière de montrer les morts-vivants au cinéma. Dans ce film, nous sommes en effet très loin de la vision esthétisante d’un Tourneur sur Vaudou (I Walked with a Zombie ). Pour sa part, Romero privilégie l’horreur graphique en nous montrant des morts-vivants dont les corps sont avariés et qui sont à la recherche de chair humaine. Tout son cinéma à venir est déjà présent dans ce premier film. En effet, ce long-métrage est un huis clos qui permet à son auteur de développer sa vision nihiliste d’une société corrompue et renfermée sur elle-même. Le film est surtout une métaphore des États-Unis des années 60 durant laquelle régnait une importante discrimination raciale. À ce titre, les zombies du film sont moins dangereux que l’Amérique puritaine et conservatrice qui rejette le héros noir de La Nuit des morts-vivants.

Always Vanilla

Longtemps invisible, ce deuxième long métrage de Romero était détesté par son auteur. Un rejet lié à un tournage difficile qui avait commencé à créer des tensions dans le groupe d’amis qui entourait Romero et lui permettait de faire ses films. Ce nouvel opus est l’oeuvre  d’un réalisateur terrifié par l’idée de s’enfermer dans le cinéma d’horreur et qui se lance alors dans un cinéma intimiste marqué par le Nouvel Hollywood. Ce long-métrage témoigne également du nihilisme de son réalisateur qui met en scène un couple de jeunes gens voulant échapper au patriarcat, mais qui finiront par imiter le comportement de leurs parents. Always Vanilla est également un film qui dénonce le consumérisme en nous montrant le milieu de la publicité comme corrompu.

Season of the Witch ou Jack's Wife

De nouveau un film sociétal pour un Romero qui propose ici une relecture du Lauréat qui adopterait le point de vue de Mrs Robinson. Le cinéaste américain utilise ici la sorcellerie pour dénoncer la pression sociale exercée par l’Amérique pudibonde sur les femmes qui sont frustrées dans leur rôle de femme au foyer. Romero montre que le patriarcat est toujours aussi fort dans une société où la morale n’a pas beaucoup évolué depuis les pères fondateurs.

The Crazies ou La Nuit des fous vivants

Comme l’évoque l’homonymie du titre français du film, La Nuit des fous vivants doit beaucoup au premier film de Romero en matière de récit. Le réalisateur de Pittsburgh remplace ici ses morts-vivants par les habitants d'une bourgade qui sont devenus psychopathes suite à la fuite d’un virus militaire expérimental. Romero tire ici à boulets rouges sur l’armée qui s’avère bien plus dangereuse que les psychotiques qu’elle doit arrêter. Les militaires sont ici totalement déshumanisées avec leurs tenues anti-bactériologiques qui masquent leurs visages. Film allégorique sur le Vietnam, The Crazies est une bombe à découvrir ou redécouvrir absolument.

Martin

Romero met en scène une fois encore une cellule familiale corrompue. Martin raconte comment un adolescent finit par se construire une identité en ayant recours aux croyances ancestrales de sa famille. Le film est d’autant plus d’actualité qu’il évoque l’intégrisme comme médium de  construction social dans une société de plus en plus chaotique. Porté par une mise en scène unique, Martin est tout simplement un chef d’oeuvre. Ce film est la première collaboration entre Romero et le producteur Richard Rubenstein qui lui va permettre de se concentrer sur la technique et l’écriture et d’avoir moins à gérer les aspects économiques d’un tournage.

Mad Will

Retrouvez la suite de notre dossier sur George Romero demain !