White Riot est un documentaire fascinant et protéiforme abordant la révolution musicale qui a eu lieu en Angleterre avec l’avènement du punk et du ska. Si le film intéressera à coup sûr les amateurs de musique, White Riot s’avère également un témoignage passionnant sur l’histoire assez méconnue de la lutte contre l’extrême droite qui contamina les esprits de notre voisin d’outre-Manche à l’aube des années 80.

Pour nous français, mais aussi pour une bonne part de la jeunesse anglaise selon la réalisatrice dans les interviews, le film nous révèle l’histoire assez méconnue de la progression dans les urnes du Front National (ça ne s’invente pas) Anglais dans un pays qui ne fut pas forcement l’eldorado du multiculturalisme que l’on nous a vendu. On voit ainsi comment l’extrême droite de la Perfide Albion essayera de faire s’opposer les communautés l’une contre l’autre en s’appuyant sur la misère sociale des quartiers défavorisés. Un Front National Anglais qui embrigadera des jeunes sans avenir pour en faire des skinheads, des bras armés bien pratiques pour terroriser les gens de couleur. Une situation d’autant plus facilitée que la police comptait dans ses membres de nombreux éléments plutôt en accord avec les thèses racistes défendues par nos nazillons anglais. Une attitude trop fréquente chez les forces de l’ordre qu’il n’en déplaise au résidant actuel de la place Beauvau.

White Riot est avant tout une belle histoire humaine, celle du collectif Rock Against Racism qui a pensé que la musique était le meilleur moyen de lutter contre l’obscurantisme qui gagnait les esprits. Ce documentaire est le reflet d’une époque où le rock se reconnectait enfin aux réalités vécues par l’homme de la rue grâce au punk ou au ska.

De plus la forme prise par le documentaire participe à la réussite du long métrage. En effet, la réalisatrice utilise le style des fanzines de l’époque, et recrée à l’écran par l’intermédiaire de l’outil numérique les photomontages et les collages typiques du scrapbooking, caractéristiques de l’esthétique d’alors. Nous plongeons ainsi vraiment dans la révolution punk, dans son refus d’adouber les vieux dinosaures du rock devenus des divas cocaïnées, faisant le salut nazi comme Bowie ou soutenant ouvertement les fascistes à la manière de Clapton dont les propos haineux sont à l’origine même de la création du collectif.

Nous découvrons ainsi le combat de Rock Against Racism qui usait d’une communication que l’on qualifierait de guérilla. Ses membres ont ainsi pendant plusieurs années recouvert les murs de l’Angleterre de leurs affiches tout en multipliant les concerts, conscients que la musique était un vecteur idéal pour construire un monde égalitaire afin d’en finir avec les relents colonialistes de notre vieille Europe.

Passionnant dans ses propos grâce aux interviews des créateurs du mouvement, le film regorge d’images d’époque qui nous permettent d’appréhender l’Angleterre miséreuse des années 70. Le film se conclut sur le Carnaval Rock Against Racism qui réunira plus de 80 000 personnes de toutes origines, chantant ensemble le poing levé pour un autre monde. Une note d’espoir qu’il faut cependant relativiser. Si ces militants ont participé à la déroute du Front National Anglais aux élections, Thatcher recyclera néanmoins les idées nauséabondes du Front (elle reprendra certains de leurs propos sur les immigrés) pour accéder au pouvoir et instaurer l’horreur sociale.

Une conclusion qui rappelle les paroles de la chanson White Riot des Clash, invitant à lancer des pavés pour changer un monde où les inégalités n’ont jamais été si nombreuses.

Un documentaire à voir en salle à partir du 5 août grâce au dsitributeur Les Bookmakers / The Jokers.

Mad Will