Goran , du réalisateur croate Nevio Marasovic, est une tragédie moderne qui n’a rien à envier à ses antiques grandes sœurs grecques.
À découvrir sur Outbuster : https://www.outbuster.com/coeur-a-vif/Goran
La critique :
Goran du réalisateur croate Nevio Marasovic est une tragédie dans laquelle le destin a pris les traits de Lina (Nataša Janjić). Cette jolie femme aveugle est la conjointe de Goran (Franjo Dijak), un chauffeur de taxi alcoolique qui se contente de sa petite vie simple entre elle et son pote Slavko (Goran Bogdan). Mais quand il apprend que notre héroïne est enceinte, il disjoncte.
On ne saura jamais grand-chose des personnages qui sont pour la plupart des hommes frustres aux prises avec l’hiver rigoureux des montagnes croates et qui se réfugient le plus souvent dans l’alcool pour oublier leur dure condition de vie. Le film est surtout le portrait d’une famille aux relations compliquées où les non-dits sont permanents. Et c’est là toute la subtilité du film : le jeu de chat et de la souris entre ce qui est su, ce qui est tu, ce qui est une évidence pour tous et ce qu’on ne voit pas, même si on l’a devant les yeux. La cécité n’est pas seulement l’apanage de Lina. D’autres aussi sont aveugles. De cet aveuglement, de ces non-dits, surgira la violence refoulée ou assumée, provoquée ou subie, préméditée ou arrivée par hasard. Elle deviendra le moyen d’expression d’êtres qui ont oublié leur morale, si tant est qu’ils en ont eu une. La question est cependant laissée ouverte par le réalisateur. Quelle est la responsabilité de chacun dans ce jeu de massacre ? Faut-il voir ou rester aveugle, pour préserver la paix en ce bas monde ? La vengeance en vaut-elle la peine ?
Mêlant tradition et modernité (ne serait-ce que par la bande-son), gore et burlesque, instants quasi insoutenables et épisodes farcesques, le réalisateur nous présente une tragédie croate moderne qui n’a rien à envier à ses antiques grandes sœurs grecques.
Laurent Schérer
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La bande-annonce :
