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Guy Ritchie est un réalisateur fascinant. En effet, à chaque fois que l’on pense le cinéaste perdu pour le 7ème art, il revient avec un film qui vient nous rappeler à quel point on aime le réalisateur d’Arnaques, Crimes et Botanique ou Snatch . Récemment Ritchie semblait pourtant un petit peu « A la dérive » avec son Aladdin où il était impossible de retrouver sa patte (titre du plus gros flop de sa carrière avec sa dulcinée Madonna en 2002 ). De la même manière, sa plongée dans les légendes arthuriennes (Le Roi Arthur) s'était révélée assez inégale. Il faut cependant savoir miser sur Guy Ritchie qui ressemble à ces boxeurs qui sont capables de gagner le combat même après avoir frôlé plusieurs fois le K.O. The Gentlemen  est une réussite et par ailleurs il avait déjà démontré auparavant sa capacité à rebondir avec son Sherlock Holmes qui avait été un carton après une série de revers au box-office.

Ritchie revient à ce qu’il sait faire de mieux : le polar. Avec son dernier film, il n’y a pas de doute, le bougre maîtrise l’exercice. Flash-back à la manière d’Assurance sur la mort , multiplication des points de vue à la manière d’un Rashomon , on prend beaucoup de plaisir à suivre The Gentlemen surtout qu’il est presque impossible de deviner où l’histoire va nous emmener. Vous pourrez m’arguer que des effets tels que le flash-back ne sont pas nouveaux dans le polar. Mais ce serait occulter l’expertise d’un cinéaste qui a une vraie habileté à jouer avec le récit, la manière dont il veut raconter son histoire, sans pour autant nous perdre. Également scénariste sur ce film, Ritchie s'avère ici un solide artisan au sens le plus noble du terme. En effet, il sait utiliser à bon escient ses effets narratifs pour nous permettre d’appréhender la psychologie d’un personnage ou d’accéder à la vérité sur une scène sans être esclave des apparences.  

Quant à la réalisation, elle est d’une grande lisibilité surtout dans les scènes d’action où il fait preuve d’un dynamisme que la plupart des réalisateurs américains de blockbusters ne posséderont jamais. De plus, il faut souligner la qualité de sa direction d’acteur. Le casting de The Gentlemen est savoureux. Matthew McConaughey, Charlie Hunnam, Hugh Grant et Colin Farrell  sont tous excellents et font admirablement sonner les dialogues ciselés du film.

Malgré un accueil assez enthousiaste d’une grande partie de la critique, des voix ici où là se sont élevées contre le film. Je vais être franc avec vous, je ne suis pas sûr que les initiateurs de ces attaques ont su appréhender le message du film qui n’est aucunement à la gloire des plus de 40 ans et de la pensée "OK Boomer". Ritchie signe avant tout un film personnel et utilise le genre pour parler de son propre parcours de cinéaste et non de la société. Il s’interroge ici sur sa carrière en ayant bien conscience qu’il a failli se perdre de l’autre côté de l’Atlantique.

Le parrain de la drogue douce joué par Matthew McConaughey est le double fictionnel du cinéaste. Le héros du film se vante de vendre exclusivement de la marijuana de première qualité. Mais son business va être remis en cause par un système qui change et privilégie maintenant la drogue dure bien plus destructrice pour les clients, mais aussi plus rentable à court terme. Ritchie est une autre sorte de dealer, un fabricant de divertissements de qualité, pensés pour amuser le public afin de lui faire oublier son quotidien sans autant le prendre pour un idiot. Mais le cinéaste voit son approche du cinéma remise en cause depuis quelques années par un Hollywood aux mains de technocrates qui ne parlent que de franchise et se fichent ouvertement de faire un bon film.  Que ce soit le héros du film ou le réalisateur, ils voient leur monde ébranlé par un système qui privilégie le bénéfice à court terme.

La vision de la jeunesse de Guy Ritchie est plutôt bienveillante. Les jeunes dans le film sont avant tout là pour remettre en cause l’embourgeoisement du héros et lui sauver la vie. Par le biais du parcours de son personnage principal, The Gentlemen parle avant tout d'un réalisateur qui s'est perdu à Hollywood et décide de revenir à l’essence même de son cinéma.

Deux heures de pure jubilation ! À voir en salles en VO pour se délecter des accents !

Mad Will