Je vous salue salope : la misogynie au temps du numérique est un film documentaire de Léa Clermont-Dion et Guylaine Maroist dans lequel les réalisatrices interviewent des femmes ayant subi de violentes campagnes de cyber harcèlement. Ce film, d'une actualité brûlante, révèle un monde terrifiant de noirceur et de haine. À ne pas manquer.

La critique :

Je vous salue salope : la misogynie au temps du numérique est un film documentaire de Léa Clermont-Dion et Guylaine Maroist dans lequel les réalisatrices interviewent Marion Séclin, Laura Boldrini, Kiah Morris, Laurence Gratton, des femmes ayant subi de violentes campagnes de cyber harcèlement, ainsi que Glen Canning, le père d’une jeune fille qui s’est suicidée après en avoir été victime. Le motif de ces attaques est le fait que ces femmes ont une vie publique et/ou engagée, en tant que femme politique, artiste, enseignante ou simplement femme. Il en ressort un film de facture classique mais dont le sujet d’une actualité brulante révèle un monde terrifiant de noirceur et de haine.

Le plus terrifiant sans doute est non seulement qu’il existe des personnes qui se déchainent contre ces femmes, parfois à visage découvert, mais aussi que les hommes au pouvoir, judiciaire ou policier, ferment les yeux, voire profitent de cet état de fait en ce qui concerne le pouvoir médiatique, ainsi que le révèle Donna Zuckerberg, la sœur du fondateur de Facebook.

La réponse trop souvent entendue de la part des victimes, est « Vous n’avez qu’à fermer vos comptes et quitter internet » Mais n’est-ce pas exactement ce que recherchent les harceleurs ? Réduire ces femmes au silence en leur fermant leur espace d’expression ?

Le film suit ces victimes dans leur quotidien, révélant toutes les conséquences de ces monstrueuses attaques. Comment cette violence a modifié leur vie, publique et privée, voire leur ont ôté dans le cas de Rehtaeh Parsons. Celles qui auraient voulu néanmoins ne pas attacher trop d’importance aux faits sont au bout du compte atteintes et minées par les incessantes insultes et menaces propagées par la toile et les réseaux sociaux. Perdant ainsi confiance en elles, ou se sentant menacées dans leur sécurité (l’une a reçu une balle par courrier postal), certaines ont renoncé à leur vie publique, ont déménagé, supprimé leur compte, alors que le rôle de l’institution et des gérants des réseaux devrait être au contraire de s’en prendre aux agresseurs et aux propagateurs de haine.

Un film coup de poing sur un sujet trop méconnu, alors que selon l’ONU 73% des utilisatrices d’internet ont subi une forme de cyberviolence.

Laurent Schérer

La bande-annonce :