Nayola est un film intense, magnifique dans sa réalisation, et d’une grande originalité dans son traitement. José Miguel Robeiro situe l’action de son film d’animation en Angola, entre 1995 et 2011, nous présentant la vie de plusieurs femmes d’une même famille, mais de générations différentes. On découvrira ainsi les aspirations et engagements de Lelena, la grand-mère, Nayola, la mère, et Yara, la petite-fille.

La critique :

« Personne ne revient de la guerre », dit Lelena à Yara sa petite fille, qui demande quand reviendront ses parents Ekumbi et Nayola. Sa mère est en effet partie chercher le père de son enfant, disparu au combat, laissant à la grand-mère la charge de Yara alors que celle-ci n’avait que deux ans.

José Miguel Robeiro situe l’action de son film d’animation Nayola en Angola, entre 1995 et 2011, enjambant la date de fin de la guerre civile en 2002. Le récit suit alternativement dans deux temporalités différentes la quête de Nayola en pleine guerre, et la vie de Yara. Devenue adolescente dans un pays enfin en paix, celle-ci  se rebelle contre le régime autoritaire en place. Le récit nous présente donc la vie de plusieurs femmes d’une même famille, mais de générations différentes.

On comprend peu à peu qui est qui dans un film où la part d’ombre réservée au spectateur est aussi celle que vivent les personnages qu’ils soient à la recherche de leurs proches ou bien soucieux de l’avenir de leur pays. Chacun ici pense agir pour une juste cause. Tous pour la liberté et le bonheur du peuple pour lesquels deux camps s’affrontent, pour Nayola qui met en avant l’amour pour son mari au détriment de celui dû à sa fille, ou, pour Yara, sa liberté d’expression risquant de compromettre ses proches. Rien n’est simple quand le moindre choix implique la prise en compte du danger et de conséquences pour autrui. Surtout au moment où la guerre sépare les familles, faisant disparaître certains de leurs membres ou les conduisant dans des camps opposés.

Le réalisateur entrelace les temporalités, les souvenirs, les secrets et les rêves, brouillant parfois les pistes par des images dont on ne sait pas vraiment à quel monde elles appartiennent. Mais peu importe, la frontière ténue entre le réel et l’irréel ne reflète-t-elle pas justement ce qui sépare nos désirs de leur réalisation ?

L’animation est pleinement au service du récit. Le dessin qui utilise des tons vifs faisant apparaître dans les décors de larges coups de pinceau, laisse par moments la place à d’autres techniques dont des images d’archives retravaillées. Ce mélange des genres picturaux renforce alors l’aspect onirique de certains passages.

Autre élément important, la présence de la nature et des animaux, dont un chacal qui suit Nayola, tel Anubis ou Kali les divinités des morts, et qui finira par se fondre en elle, rappelant que l’homme n’est qu’une partie du vivant.

Bref, un film intense, magnifique dans sa réalisation, et d’une grande originalité dans son traitement.

Laurent Schérer

La bande-annonce :