Visible cette semaine en salles en version restaurée grâce au distributeur Les acacias, Casque d’or de Jacques Becker est avant tout remarquable pour la prestation haute en couleur de Simone Signoret. Ce film est un classique qu’il est nécessaire d’avoir vu pour tous ceux qui, de près ou de loin, s’intéressent à l’histoire du cinéma.

La critique :

Casque d’or de Jacques Becker est avant tout remarquable pour la prestation haute en couleur de Simone Signoret en Marie. Celle-ci, parce qu’elle a dansé avec Manda (Serge Reggiani) et rendu Roland, son amant du moment, fou de jalousie, entraine avec elle ces hommes dans un destin tragique. Signoret porte le film en interprétant magnifiquement son personnage. Elle obtient ici l’adhésion des autres comédiens et des techniciens qui se mettent au diapason de son immense talent. Amoureuse et heureuse durant la parenthèse enchantée où elle passe des moments sans nuages avec son amant, on sent chez elle une femme forte, volontaire, et décidée à obtenir sa part de bonheur. Sa qualification de femme du peuple lui permet d’utiliser sa gouaille pour revendiquer sa place qui n’est d’être ni potiche, ni boniche. Jusqu’au bout elle fera face. Mais réclamer sa liberté dans ce monde de voyous ne va pas sans risque. C’est ce que le film nous donnera à voir.

Les ouvertures : portes, fenêtres, vitrines, sont nombreuses, et servent à chaque fois à symboliser le passage d’un monde à l’autre. Celui de la raison à celui de la passion, celui de l’honnêteté à celui des malfrats. Il y a ceux qui regardent, comme la foule qui scrute l’intervention des policiers dans le tripot, et ceux qui, comme Manda franchissent le pas, de la raison à la passion et de la passion au crime. Via une mise en scène sans fioriture où Jacques Becker cultive le hors champ, Casque d’or nous fait vivre le destin tragique d’un couple dont l’issue ne pouvait être que fatale. Comme le symbolisait la valse du début, Manda est entrainé dans un tourbillon qu’il ne maitrise pas et qui le fera franchir successivement les différentes étapes vers sa perte. La dernière fenêtre sera celle de l’appartement par laquelle Marie peut voir par-dessus les murs de la prison, vision qui sonnera le glas de leur histoire d’amour.

Adaptant de façon trop parcellaire le fait divers dont il revendique être l’adaptation, le scénario peut s’avérer parfois convenu. Outre son interprétation, il faut donc voir Casque d’or  pour les magnifiques décors signés Jean d’Eaubonne qui parvient ici à recréer le Belleville du début du XXème siècle à travers ses bars louches où rodent de petits malfrats. C’est ce parti pris naturaliste pour un mélodrame amoureux qui, en mélangeant les genres, aura peut-être heurté un public qui, rappelons-le, ne fut pas d’emblée au rendez-vous. Il n’empêche qu’aujourd’hui ce film, s’il n’est pas rangé dans la catégorie des chefs-d’œuvre, reste un classique qu’il est nécessaire d’avoir vu pour tous ceux qui, de près ou de loin, s’intéressent à l’histoire du cinéma.

Laurent Schérer

La bande-annonce :