30 ans après avoir réalisé C’est arrivé près de chez vous, André Bonzel signe avec Et j’aime à la fureur une œuvre singulière constituée par un montage d'images d'archives familiales sur une musique de Benjamin Biolay. Un vrai coup de cœur qui nous captive de bout en bout.

La critique :

« Je voulais que le film raconte ma vie, le cinéma et le siècle » annonçait André Bonzel lors d’un entretien. Cet objectif est aujourd’hui pleinement réussi.

Il y a des réalisateurs qui signent un film par an, voire plus. André Bonzel n’est pas de ceux-là. Il a pris son temps pour nous délivrer Et j’aime à la fureur, son second film après le cultissime Ç’est arrivé près de chez vous. En effet, 30 ans séparent ces deux longs-métrages, une sorte de record dans le milieu du cinéma ! Mais cela valait le coup d’attendre. En effet, Et j’aime à la fureur est un véritable coup de cœur. Élaboré à partir d’images d’archives familiales et personnelles sur une musique originale de Benjamin Biolay, ce film nous captive de A à Z.

Il existe des longs-métrages qui intéressent principalement ceux qui d’une façon ou d’une autre ont participé à leur élaboration, mais dont l’intérêt est bien moindre pour le public qui les découvre. Pour autant,  Et j’aime à la fureur n’appartient pas à cette catégorie d’œuvres autocentrées au sérieux plombant. C’est même tout le contraire, Bonzel ayant su monter et commenter les images en sa possession pour en faire ressortir l’aspect comique. L’autre intérêt du film est sa documentation exceptionnelle qui couvre plusieurs générations depuis les tous débuts du cinéma. En effet, l’ancêtre d’André Bonzel a été un des premiers acheteurs de l’invention des frères Lumière, et de génération en génération, la fibre réalisatrice a perduré. Des centaines d’heures de rushes authentiques, tournés avec soin et dans lesquels il a pioché, montant ces images afin de fabriquer son propre roman familial auquel il n’avait pu avoir accès étant jeune, à cause d’un père muet et d’une mère taiseuse. Le réalisateur monteur nous offre alors un film sur le temps qui passe, pas seulement pour un seul homme, mais sur plusieurs générations.

Cependant tout cela n’aurait pas été possible sans l’amour qu’André Bonzel porte au cinéma. Enfant, il visionnait chez le père d’un de ses amis des films du début de siècle (Chaplin, Keaton, Murnau…). Dès lors, il n’a pensé qu’à une seule chose : suivre la trace de ces réalisateurs. « Mon film raconte ça : le désir à tout prix de faire un film » confesse ainsi André Bonzel. C’est en visionnant les rushes des films familiaux qu’il découvrira les marques de vies aussi passionnantes que celles contées dans les œuvres découvertes lors de son enfance, et qui lui ont prodigué l’amour du 7ème art. Pour lui les images valent mieux que les souvenirs.

Pour tous les amoureux du cinéma, Et j’aime à la fureur est une œuvre singulière à découvrir en salles.

Laurent Schérer

La bande-annonce :