Après le suicide de son amant, Gina (Lindsay Burdge), hôtesse de l’air aux Etats-Unis, décide de faire une pause professionnelle et de s’installer à Paris pour se rapprocher de Jérôme (Damien Bonnard, révélation de Rester Vertical), rencontré lors d’une escale. Le problème c’est que Jérôme, quadragénaire aux multiples amantes, n’a aucunement l’intention de se consacrer à l’Américaine dont la présence va vite être pesante. Totalement obsédée par lui, Gina commence à le traquer partout, allant jusqu’à s’installer dans sa rue et se faire embaucher dans la boîte de nuit où il travaille. Eternelle optimiste, elle ne semble pas se soucier de l’unanime rejet dont elle est victime. Car ce n’est pas uniquement Jérôme qui la délaisse, mais l’intégralité du peu de gens qu’elle rencontre, tous lassés de cette étrangère qui s’incruste en babillant quelques mots de français. Seules ses anciennes collègues s’inquiètent pour elle, peu crédules quant à la relation idyllique qu’elle prétend entretenir avec Jérôme. Lorsque débarque Clémence (Esther Garrel), l’ex de Jérôme qu’il est bien décidé à reconquérir, Gina tombe dans la dépression mais n’abandonne pas son objectif : Jérôme sera à elle.

C’est qui cette fille est un conte très cruel sur l’illusion dans l’amour à sens unique. Sa précision dans la description du sentiment de solitude et de l’aveuglement face à un être indifférent est effrayante de réalité et parvient à propager un grand malaise chez les spectateurs. Difficile de rire des plans minables que Gina met en place pour croiser Jérôme dans la rue ou l’empêcher de vivre sa romance avec Clémence. Même si sa folie est avérée, on parvient parfois à ressentir pour elle un semblant de compassion, tant elle nous renvoie avec une facilité déconcertante à nos propres hontes ou déceptions d’un amour rejeté.

Le film réjouit grâce à son casting de jeunes acteurs du cinéma français, notamment Damien Bonnard très à l’aise en salaud que l’on accepte de plaindre et Esther Garrel en rockeuse jalouse. Inspirée de Lola, une femme allemande de Fassbinder, les couleurs sont stylisées façon années 80, apportant un aspect délicieusement vintage à l’image. Nathan Silver a choisi de faire appel aux services de Sean Price Williams (chef opérateur de Good Time des frères Safdie) qui propose le même type d’éclairage rose et violet des cabarets de nuits et des rues parisiennes.

Attention, sous ses apparences de film léger de l’été, C’est qui cette fille n’a rien d’une comédie, mieux vaut être de bonne constitution pour apprécier les méandres sentimentaux de cette femme qui s’humilie par désir d’être aimée.


S.D.