Le documentaire Après l’ombre réalisé par la réalisatrice Stéphane Mercurio, (À l’ombre de la république, Mourir ? plutôt crever !, À côté), invite le spectateur à participer aux répétitions d’une pièce de théâtre, Une longue peine, montée par Didier Ruiz, directeur de La compagnie des Hommes.  Les acteurs sont d’anciens détenus condamnés à de longues peines et libérés après 12, 15, voire 20 ans de réclusion et la compagne de l’un d’eux.

Le film questionne sur ce qu’il peut rester d’un long passage en prison. Jamais on ne saura pour quels motifs ces hommes se sont retrouvés derrière les barreaux, ils sont des personnes libres qui souhaitent apporter un témoignage de leur état après leur sortie. Ce qui ressort de plus frappant dans leurs propos c’est que la prison a été dans leur vie un moment vide de sens et qu’ils se retrouvent à la sortie au même âge mental que lors de leur arrivée. « L’expérience » dite carcérale ne leur a rien strictement rien apporté en terme de construction de l’individu. C’est même l’opposé. Ces hommes ont ainsi vécu dans un monde où leur vie a été mise entre parenthèses, seules les atteintes physiques liées au vieillissement et à la mauvaise qualité des soins font preuve des années passées derrière les barreaux.

Un des rôles théoriquement dévolus à la prison, celui de la réinsertion n’est pas atteint. Par contre le travail fait avec le metteur en scène Didier Ruiz permet à ces anciens détenus de retrouver la capacité de s’exprimer. Au fur et à mesure des répétitions, la pensée se clarifie, les voix s’affirment et ces hommes passent peu à peu du statut de témoins à celui de comédiens. Et petit à petit on se rend compte qu’il s’est instauré entre ces anciens détenus et ces professionnels du théâtre, une relation de travail et de confiance. Nous assistons à la naissance d’une troupe. Ce qui nous émeut plus encore que les mots.

C’est donc un film qui nous conforte dans l’idée que la prison n’est pas forcement la solution, et cela non par des chiffres et des statistiques anonymes (taux de récidive, surpopulation etc.), mais grâce aux portraits de ses hommes pensants devenus comédiens.

Un film à voir pour tous ceux qui s’intéressent au devenir de nos prisonniers.

L.S.