Le film est disponible en VOD : http://www.universcine.com/films/harlequin

À l'occasion de la sortie d'Harlequin en combo Blu-ray / DVD chez Rimini Éditions, je vous propose aujourd'hui de retrouver ma critique du film que j’avais rédigée lors de mon arrivée au sein de la rédaction de Chacun Cherche Son Film

Grâce à cette nouvelle édition d'Harlequin accompagnée par un livret signé Marc Toullec, vous en saurez plus sur l’explosion du cinéma fantastique australien à la fin des années 70. En matière de suppléments, vous aurez le droit à plus de 48 minutes d’interviews avec pour intervenants le réalisateur Simon Wincer ou bien encore le scénariste Everett De Roche. À noter que le master utilisé par Rimini enterre les précédentes éditions en matière de piqué et de luminosité. Un achat tout simplement indispensable pour tous les amateurs de cinéma fantastique.

 

La critique du film

Harlequin est une œuvre que vous ne recroiserez pas de sitôt dans une salle de cinéma ou sur votre téléviseur. Cette réalisation de Simon Wincer est en effet symptomatique du fantastique Australien qui offrait un vrai regard sur le monde tout en s’inscrivant dans le cinéma de genre. Que ce soit Mad Max, Pique-nique à Hanging Rock ou encore La Dernière Vague, le continent océanien nous a offert tant de grands moments de cinéma ! Harlequin possède un charme fou grâce à son ambiance mystérieuse, sa réalisation et son univers fantasmagorique. Et je peux vous assurer qu’arriver au crépuscule de votre vie de cinéphile, c’est une réalisation qui vous restera en mémoire tant elle s’avère singulière et profondément touchante.

Mais que raconte le film ?

Le fils du sénateur Nick Rast est miraculeusement guéri de la leucémie par Grégory Wolfe, un guérisseur aux pouvoirs extraordinaires. Wolfe apprend par ailleurs au sénateur que Wheelan, son principal soutien politique, le manipule à son insu, mais Wheelan lui fait croire que Wolfe est un charlatan et le convainc de la nécessité de le supprimer...

Le scénario d'Harlequin est l'oeuvre d'Everett De Roche. Les amateurs de fantastique connaissent bien le bonhomme pour ses scripts comme Long Weekend ou Patrick (et son H.P. en folie). À la réalisation, nous retrouvons Simon Wincer qui signe ici son second film après Snapchot, une sorte de  Neon Demon avant l'heure (c'est pas beau de copier Nicolas Winding Refn !). Au casting, deux acteurs anglais se partagent l’affiche. Nous retrouvons ainsi David Hemmings bien connu par les cinéphiles pour Blow Up et Robert Powell entraperçu par les spectateurs anglais dans de nombreuses fictions télé. Si Hemmings nous offre une prestation plus que correcte, son camarade de jeu lui vole indéniablement la vedette dans son rôle de gourou. Multipliant les registres de jeu, Robert Powell est tout bonnement extraordinaire par sa capacité à vous inspirer la sympathie ou la peur dans la même minute. De plus le charisme de l'acteur fait que son personnage n'est jamais ridicule alors qu'il se promène en tenue d'Arlequin durant tout le film. Du point de vue de la mise en scène, Simon Wincer est en pleine possession de ses moyens et signe ici sans doute son meilleur film. Oeuvre politique, pamphlet religieux, relecture de l'histoire de Raspoutine, les pistes d’interprétation sont nombreuses et chacun analysera le film selon sa propre sensibilité.

Une ouverture magistrale

En quelques plans tout est dit grâce à la mise en scène et le montage. Sans aucune musique, les premières images sont celles d’un nageur qui va bientôt mourir sous les flots (introduction qui fonctionne parfaitement avec la conclusion du film). Puis le réalisateur utilise un montage alterné où l’on voit l'ascension au sommet de l'État du sénateur Rast (joué par Hemmings) alors que se déroule au même instant la fête de son fils atteint de leucémie. Le montage alterne alors équitablement les deux séquences jusqu’au moment où notre Harlequin déguisé en clown sort un jeu de cartes. Un joker dépasse du jeu. Le réalisateur mixe alors les ambiances sonores des deux scènes pour nous indiquer la prise du pouvoir par Robert Powell de l’environnement intime de sénateur Rast. Et même si le politique arrive finalement à l’anniversaire de son fils, il a perdu son autorité sur son espace familial. Au fur et à mesure du long-métrage, Robert Powell va petit à petit contrôler la famille d'Hemmings, devenant le père de substitution du garçon, l’amant de la femme abandonnée et même la conscience morale du sénateur qui doit faire face à un entourage politique des plus nébuleux.

Une œuvre « culte »

L'essentiel du film se déroule dans la riche villa abandonnée du sénateur qui fait penser à une scène de théâtre (il n’y a aucune habitation autour, on dirait presque un plateau nu) où se jouerait le futur du pays. Les ruptures de ton participent également au plaisir ressenti devant le long-métrage. Suspens, manipulation… Un film riche, où même les noms ont une importance, à l’image du patronyme du sénateur Rast qui est tout simplement le mot Tsar inversé.

Poétique, politique, magique, porté par une magnifique partition de Brian May et bien interprété, Harlequin est un film culte d’une richesse incroyable à redécouvrir absolument !

Mad Will