Lors d’un mariage, Carlos (Antonio De La Torre) se porte volontaire pour se faire hypnotiser par le cousin (José Motta) de sa femme Carmen (Maribel Verdú). Malgré son scepticisme initial, il ressort de l'expérience transformé. Lui qui était un macho endurci, démissionnant sans scrupule devant la moindre tâche domestique, se mue en véritable fée du logis. Même si elle apprécie le changement, Carmen s'inquiète pour son mari et souhaite surtout découvrir à qui appartient cette âme sœur qui en a pris possession.

   Radicalement anticonformiste, Abracadabra surprend dès les premières minutes, avec ses costumes kitschissimes et son surjeu ostentatoire. Il ne faut pas s’y laisser prendre. L’excès même de ‘‘mauvais goût’’ nous met heureusement la puce à l’oreille et nous découvrons vite qu’il n’est pas le signe de l’absence de talent du réalisateur, mais bien de la revendication farcesque de son cinéma. Habilement mis dans la disposition de ne pas prendre trop au sérieux ce qui nous est montré, nous avons ensuite l’esprit suffisamment ouvert pour accepter toutes les fantaisies narratives et visuelles auxquelles Pablo Berger nous convie joyeusement. Véritable feu d’artifice de situations cocasses sur fond de spiritisme et de schizophrénie, Abracadabra réussit par ailleurs à maintenir la cohérence et même à créer un véritable suspense à propos de son intrigue centrale : la revanche d’une épouse négligée. A travers celle-ci, derrière sa polychromie chatoyante, son inventivité hypnotisante et son humour absurde, le dernier film du réalisateur de Blancanieves se révèle une nouvelle fable sombre et caustique.

Florine Lebris