À l'occasion de la sortie de son dernier film Les herbes sèches, pour lequel l'actrice Merve Dizdar a été récompensée à Cannes par le prix d'interprétation féminine, nous vous invitons à (re)voir son précédent Le poirier sauvage.

Pour voir Le poirier sauvage depuis votre canapé, accès au film : https://www.universcine.com/films/le-poirier-sauvage

La critique :

Quatre ans après Winter Sleep, sacré d’or lors de la 67eme édition du festival de Cannes, Nuri Bilge Ceylan a fait cette année une apparition plus timide sur la Croisette. Projeté en dernière séance, Le Poirier Sauvage n’a pas su conquérir le Jury de Cate Blanchett. Peut-être jugé trop bavard, trop long, trop académique.

Pourtant, les trois heures huit investies par le cinéaste turc filent, et nous emportent à nouveau au cœur de l’Anatolie où revient Sinan, fraichement diplômé à Istanbul. De retour dans son village natal, le jeune homme est à la recherche de 2000 livres pour éditer son premier essai. Il ne peut compter sur sa famille, dont la situation financière problématique ne va pas en s'améliorant, car chaque sou continue d’être dilapidé au jeu par le père.

Au détour des rues et des champs, Sinan retrouve les gens qu’il a aimé : une fille bientôt mariée, des amis imams et un écrivain renommé. De ces rencontres naissent de longs dialogues sur l’amour, la religion, la liberté.

Partant du récit classique du retour de l’enfant au pays, Nuri Bilge Ceylan déploie toutes ses qualités de portraitiste pour décrire une fois encore la « Turquie profonde » confrontée au jugement parfois injuste du citadin Sinan. Si le jeune homme apparait d’abord comme une voix raisonnée, il peut aussi devenir un personnage antipathique par son mépris de la province. Il s’oppose alors à celui dont il ne supporte plus les fantaisies, son père, qui, malgré son détachement envers sa famille, est un personnage plutôt sympathique, un joyeux drille illuminé, un homme de la campagne, à qui on n’ose pas reprocher d’aimer son chien et sa cabane.

 Le poirier sauvage est un arbre solitaire, déformé, mais dont les fruits sont excellents. Il donne son nom au film et également au premier livre de Sinan, l’aspirant écrivain. L’image apparait alors comme évidente : le vieil arbre repoussant mais fructifère est ce passé honteux et cette famille embarrassante qu’on se doit de perpétuer.

Un film intense, de toute beauté formelle et visuelle, à ne pas manquer.

Suzanne Dureau

La bande-annonce :

Pour voir Le poirier sauvage depuis votre canapé, accès au film : https://www.universcine.com/films/le-poirier-sauvage